# Anticor

Le pantouflage

Le pantouflage correspond à une déclinaison de la prise illégale d’intérêts, visant uniquement les anciens agents publics. Elle est régie par l’article 432-13 du Code pénal.

Cette infraction correspond au fait, pour un ancien agent public (largo sensu) de travailler, de conseiller ou de prendre des parts sociales au sein d’une entreprise avec laquelle il a travaillé, ou qu’il a dû surveiller ou contrôler durant ses anciennes fonctions publiques, moins de 3 ans après l’expiration de ces-dernières.

Les éléments constitutifs du pantouflage

1.Condition préalable

L’auteur de l’infraction doit :

  • Soit être un ancien membre du Gouvernement, membre d’une autorité administrative indépendante ou d’une autorité publique indépendante, titulaire d’une fonction exécutive locale, fonctionnaire, militaire ou agent d’une administration publique.
  • avoir été chargé d’assurer la surveillance ou le contrôle d’une entreprise privée, de formuler un avis sur des contrats, de proposer directement à l’autorité compétente des décisions relatives à des opérations réalisées par une entreprise privée, ou de formuler un avis sur de telles décisions.
  • Soit avoir été un agent d’un établissement public, d’une entreprise publique, d’une société d’économie mixte dans laquelle l’état ou les collectivités publiques détiennent directement ou indirectement plus de 50% du capital et des exploitants publics.

2.Élément matériel

Le pantouflage peut correspond à deux actes distincts:

  • Travailler, conseiller ou obtenir des parts sociales au sein de l’une des entreprises avec laquelle l’auteur a travaillé durant ses anciennes fonctions.
  • Travailler, conseiller ou obtenir des parts sociales au sein d’une entreprise privée qui possède au moins 30% de capital commun ou a conclu un contrat comportant une exclusivité de droit ou de fait avec l’une des entreprises mentionnées au ci-dessus.
  • Avant l’expiration d’un délai de 3 ans suivant la cessation de ses fonctions.

Le législateur assimile à une entreprise privée toute entreprise publique exerçant son activité dans un secteur concurrentiel et conformément aux règles du droit privé.

L’ancien fonctionnaire doit prêter une collaboration se prolongeant ou susceptible de se prolonger un certain temps, et non un concours instantané et occasionnel[1].

3.Répression

La peine maximale de l’infraction est de 3 ans d’emprisonnement et 200.000 euros d’amende dont le montant peut être porté au double du produit tiré de l’infraction.

Exemples

1.Exemples jurisprudentiels

– le fait pour un ancien président de la commission d’autorisation de mise sur le marché de médicaments, qui a donné son avis sur des autorisations demandées par une société de l’industrie pharmaceutique, d’être devenu consultant de cette société moins de 3 ans plus tard[2].

–  l’ancien inspecteur des impôts reconverti en agent d’affaires qui donnait des conseils juridiques et fiscaux à des entreprises qu’il était en charge de contrôler dans le cadre de ses anciennes fonctions[3].

2.Exemple chez Anticor

Affaire AMF : Madame Stéphanie Cabossioras haut-fonctionnaire, a occupé le poste de directrice juridique de l’AMF. À ce titre, elle était chargée de réguler les actifs numériques comme les crypto-monnaies et les entreprises intervenant dans le secteur boursier. Elle explique avoir élaboré le nouveau régime légal des Prestataires de Services sur Actifs Numériques (PSAN) qui régule leurs activités et définit les conditions d’accès à ce statut.

Il s’agit d’un secteur important puisque ces entreprises fournissent des services comme l’échange d’actifs numériques ou la gestion de portefeuille crypto.

Or, en avril 2022, Mme Cabossioras a quitté son poste de directrice juridique de l’AMF pour rejoindre le groupe crypto-financier BINANCE. Ce groupe propose des services d’échange de crypto-monnaies et de gestion de portefeuilles en ligne. De ce fait, le délai de 3 ans n’a pas été respecté et Anticor a transmis un signalement au Parquet National Financier pour prise illégale d’intérêts.


[1] Crim. 11 mai 1928 : Bull. crim. n°140 ; Gaz. Pal. 1928. 2. 239.

[2] https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000029932433/

[3] https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007062930

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