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Affaire des sondages de l’Élysée : plus de 10 ans après la première plainte d’Anticor, le procès s’ouvre à Paris.

Dans un rapport rendu public en juillet 2009, la Cour des comptes a épinglé des contrats passés sans respect des règles de la commande publique entre l’Élysée et des sociétés de sondages, sous la présidence de Nicolas Sarkozy. Le 10 février 2010, Anticor a déposé une première plainte pour favoritisme et détournement de fonds publics.

À quelques jours de l’ouverture du procès, qui se tiendra du 18 octobre au 12 novembre au Tribunal de Paris, Anticor revient sur le long parcours judiciaire de ce dossier particulièrement important, dès lors qu’il touche au domaine des sondages, dont la mise en place est susceptible d’influencer voire de manipuler l’opinion publique.

Entre 2007 et 2012, plusieurs millions d’euros ont été dépensés par l’Élysée dans la commande de sondages et de conseils en opinion (plus de 300 sondages pour 9,4 millions d’euros) dont certains portaient sur des affaires privées ou des questions partisanes.

Or, il apparaît d’une part que des contrats ont été passés avec des sociétés détenues par deux conseillers du Président (Patrick Buisson pour Publifact et Publi Opinion et Pierre Giacometti pour No Com).

D’autre part, des commandes de sondages ont été réalisées auprès d’instituts sans appel d’offres, allant à l’encontre de la réglementation relative aux marchés publics impliquant la nécessaire mise en concurrence d’entreprises pouvant répondre à l’offre de service de la Présidence.

La première plainte d’Anticor, classée sans suite fin 2010, a fait l’objet d’une constitution de partie civile de l’association. À la suite de quoi, le juge d’instruction Serge Tournaire a estimé en mars 2011 qu’il était opportun d’ouvrir une information judiciaire.

Le parquet a fait appel de cette décision et la Cour d’appel a finalement tranché en novembre 2011 en faveur de ce dernier, estimant que l’immunité présidentielle, dont bénéficiait Nicolas Sarkozy, devait s’étendre aux collaborateurs du Président.

Anticor s’est alors pourvue en cassation.

En parallèle, le militant anticorruption Raymond Avrillier a fait une demande de communication de documents administratifs à l’Élysée, dont la transmission a été ordonnée par le Tribunal administratif en mars 2012, lui permettant d’accéder aux conventions, factures, contrats et études relatives aux commandes.

À la lumière de ces nouveaux éléments, il paraissait nécessaire de s’interroger pour savoir si les sondages commandés répondaient à une initiative partisane ou personnelle et vérifier s’il s’agissait d’actes détachables de la fonction présidentielle. Anticor a donc déposé une nouvelle plainte contre X le 9 octobre 2012.

Le 19 décembre 2012, un arrêt de la Cour de cassation a indiqué que l’immunité présidentielle ne s’étend pas aux collaborateurs et a ordonné que l’information judiciaire soit ouverte.

En novembre 2018, le Parquet national financier (PNF) a demandé le renvoi en correctionnel de six proches de Nicolas Sarkozy.

La ténacité d’Anticor dans ce dossier a permis de confirmer qu’aucune immunité ne pouvait justifier la non-applicabilité du Code des marchés publics par les services de la Présidence.

L’association rappelle que ces règles permettent d’assurer l’efficacité de la commande publique et l’égalité de traitement entre les candidats.

Quant à la bonne utilisation des deniers publics, il est manifeste que ces derniers ne peuvent servir à informer le représentant de l’État de l’opinion des citoyens sur des sujets relevant de sa vie privée, à servir les intérêts d’un parti politique, ou à définir une stratégie partisane en vue des prochaines élections.

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